La centralité de Jésus dans la vie spirituelle
Le Mystère Pascal
Le processus d’intégration / récapitulation de la vie humaine et missionaire au Mystère Pascale
Le processus d’intégration / récapitulation de la vie
I. LA CENTRALITE DE JESUS
Le mystère Pascal est une réalité de la passion, de la mort et de la résurrection du Christ. Comme le Pape Benoît XVI le dit : "Le mystère pascal, que le Triduum pascal nous fait revivre, n'est pas seulement un souvenir, mais une réalité actuelle. Aujourd'hui encore, le Christ triomphe du péché et de la mort par son amour". Ce mystère Pascal est le sommet de la mission du Christ.
Nous sommes en train de vivre dans un monde où l’on voit le mal et le bien, la souffrance et le bien-être , la tristesse et la joie. Nous sommes préoccupés par le souci de faire le bien et d’éviter le mal, d’éliminer les souffrances, la guerre, la misère, l’injustice, la haine et la division qui accablent l’humanité et par contre de créer un monde uni, plein d’amour et de communion fraternelle, un monde où nous vivrions comme des frères et des sœurs d’une famille de Dieu, comme un peuple de Dieu, comme une nation sainte, dans la paix et dans la prospérité. Mais alors on se demande est-ce que cela est possible ? Je dirais que la réponse se trouve dans la réalité du mystère pascal de Jésus où on retrouve le sens de la positivité et de la négativité de la nature de l’homme.
Le projet de Dieu le Père est de faire du Christ le cœur du monde. Le cœur est l’organe fondamental dans le corps de l’homme. Le cœur de l’homme est localisé dans une partie du corps mais ses effets se font sentir partout dans le corps entier. Le cœur pompe le sang qui est distribué entièrement vers chaque partie du corps. Donc l’effet du rythme du cœur ne se fait pas seulement sentir au niveau de la tête, de la poitrine, des mains ou des pieds mais aussi dans les sentiments et dans les passions de l’homme. Quand on parle d’amour, de joie, de tristesse etc., le rôle du cœur dans tout cela est indispensable. L’existence d’un homme sans cœur donc inimaginable .
Dans ce même sens nous ne pouvons pas cheminer vers la sainteté, vers la communion fraternelle dans interculturalité, vers la construction de Royaume de Dieu et ainsi vers la vie éternelle si nous ne possédons pas le cœur qui fait fonctionner tout ce qui est visible et invisible. Ce coeur est comme le moteur qui cordonne nos activités, nos œuvres, nos projets et nos rêves de vie religieuse. Jésus mort et ressuscité est considerè comme le cœur de l’homme, le point vital de tout ce qui existe. C’est lui la clé de l’univers et surtout l’unique possibilité de redemption, l’Alfa et l’Oméga, le commencement et la fin, le premier et le dernier, la lumière et la chaleur, le centre et la racine, le sens et la beauté de l’existence de l’homme. Ce pourquoi St. Paul s’est senti inspiré un jour et a rédigé deux hymnes qui décrivent cette centralité du Christ dans le projet divin du Père. Ephésiens (1,3-14) et Colossiens (1, 15-20).
Þ La récapitulation dans Christ.
Pour Paul tout est dans le Christ, la Réalité visible et la réalité invisible, donc le rythme de notre vie est fondé en lui dans tous ses aspects ; soit la naissance, la croissance, le travail, la jeunesse et la vieillesse, la vocation, et la mort tout vient de lui et tout est en lui. (2cor4, 4) (Col 1,15). C’est toujours en lui que chaque chose trouve son sens. Dans l’hymne éphésiens 1,10 St. Paul parle du processus de récapituler toute chose dans le Christ celles du ciel et celles de la terre. Récapituler signifie le processus d’intégration. ( Le livre du P. Amedeo Cencini , l’albero della vita)
Eph. 1,3-14 Que la grâce et la paix vous soient données de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus Christ!
Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ, qui nous a bénis de toute sortes de bénédictions spirituelles dans les lieux célestes en Christ! En lui Dieu nous a élus avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints et irrépréhensibles devant lui, nous ayant prédestinés dans son amour à être ses enfants d'adoption par Jésus Christ, selon le bon plaisir de sa volonté, à la louange de la gloire de sa grâce qu'il nous a accordée en son bien-aimé. En lui nous avons la rédemption par son sang, la rémission des péchés, selon la richesse de sa grâce, que Dieu a répandue abondamment sur nous par toute espèce de sagesse et d'intelligence, nous faisant connaître le mystère de sa volonté, selon le bienveillant dessein qu'il avait formé en lui-même, pour le mettre à exécution lorsque les temps seraient accomplis, de réunir toutes choses en Christ, celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre.
Colossiens 1, 15-20 Rendez grâces au Père, qui vous a rendus capables d'avoir part à l'héritage des saints dans la lumière, qui nous a délivrés de la puissance des ténèbres et nous a transportés dans le royaume du Fils de son amour, en qui nous avons la rédemption, la rémission des péchés. Il est l'image du Dieu invisible, le premier-né de toute la création. Car en lui ont été créées toutes les choses qui sont dans les cieux et sur la terre, les visibles et les invisibles, trônes, dignités, dominations, autorités. Tout a été créé par lui et pour lui. Il est avant toutes choses, et toutes choses subsistent en lui. Il est la tête du corps de l'Église; il est le commencement, le premier-né d'entre les morts, afin d'être en tout le premier. Car Dieu a voulu que toute plénitude habitât en lui; il a voulu par lui réconcilier tout avec lui-même, tant ce qui est sur la terre que ce qui est dans les cieux, en faisant la paix par lui, par le sang de sa croix. Et vous, qui étiez autrefois étrangers et ennemis par vos pensées et par vos mauvaises oeuvres, il vous a maintenant réconciliés par sa mort dans le corps de sa chair, pour vous faire paraître devant lui saints, irrépréhensibles et sans reproche.
II. LE MYSTERE PASCAL
A) La passion, la souffrance et la mort de Jésus
La passion et la mort de Jésus étaient deux choses négatives, donc un mal, mais Jésus a transformé les deux actes de la passion et de la mort en une chose positive. Auparavant, la passion et la souffrance de l’homme n’avaient pas de sens, elles étaient considérées comme une malédiction, une humiliation, une punition ou encore une condamnation. Mais alors Jésus a opté d’embrasser cette réalité de la passion pour engendrer une réalité positive avec le motif de sauver l’humanité.
Aujourd’hui, la passion et la souffrance existent encore dans nos vies, nous subissons des crises mondiales : économique, alimentaire, politique, sanitaire, vocationnelle, … Quelle est notre position devant toutes ces réalités? Souvent nous avons la tendance de condamner les uns ou les autres en leur disant coupables. Une autre tendance est celle de chercher à la cause de ces souffrances humanitaires.
Par sa passion, Jésus nous a apprit à ne pas condamner les autres et à ne pas demander pourquoi la présence de la passion et de la souffrance, mais plutôt à donner le sens à de pareilles expériences .
Le Pape Jean Paul II a souligné qu’il n’y a pas d’existence humaine sans souffrance, moi je adjouterais qu’il n’ y a pas de mission sans souffrance et sans passion. Quand nous, missionnaires de la Consolata au Congo, nous nous trouvons devant les défis économiques et le manque de personnels, nous répondons avec l’esprit de désespoir, de découragement et de pessimisme, alors on risque de ne pas trouver un sens à donner à ces défis. Nous devons nous référer à la passion et souffrance du Christ qui donnent le sens à tout.
B) La Croix de Jésus
Comme nous avons vu à propos de la souffrance et de la passion, au départ la croix était un instrument pour les Juifs qui n’avait pas de sens comme le dit St Paul. la croix était une stupidité pour les juifs mais une sagesse pour les chrétiens. Jésus a transformé cet instrument qui était négatif en un élément positif, source du salut et signe de victoire sur le mal. Aujourd’hui notre vie chrétienne est centrée sur cet instrument. Tout vient de la croix et tout retourne à la croix. C’est dans la croix que nous trouvons la vie car la croix est l’arbre de vie, ce n’est pas comme l’arbre de la mort qu’on trouvait au centre du jardin d’Eden. C’est pour cela, dans la liturgie de vendredi saint, que nous répondons : « voici le bois de la croix, qui a porté le salut du monde. Venez, adorons ». Cet arbre a récupéré la vie de l’humanité perdue depuis la création. Le vendredi Saint nous contemplons Jésus dont la croix révèle la souveraine majesté. Le bois du supplice infamant est devenu l’instrument de la rédemption universelle, le signe et le gage de l’amour infini de Dieu.
C) La résurrection de Jésus
Comme St Paul nous le dit, la résurrection est la fondement de notre foi. Ce qui signifie que, si nous nous arretons à la mort de Jésus, être chrétien ne peut pas avoir de sens car jusque là, notre Dieu serait vaincu par le mal, alors qu’il est suffisamment parfait de par sa nature. L’humanité trouve espérance de la gloire éternelle. Cette gloire consiste dans le bonheur et la vie éternelle. Par sa résurrection, Jésus a vaincu le mal donc la mort, la souffrance, et toutes les négativités humaines, donc nous sommes transformés en nouvelles créatures à travers la résurrection.
III. LE PROCESSUS D’INTEGRATION
Chacun de nous a son histoire. l’histoire est le rassemblement des événements positifs et négatifs. Dans son histoire, l’homme fait des expériences positives et négatives, il a la tendance d’oublier, de supprimer et même d’ignorer celles qui sont négatives. Il faut savoir que notre Dieu est un Dieu d’histoire, il se révèle à l’humanité à travers l’histoire. L’histoire parle aux cœurs qui écoutent. Donc l’histoire est si importante pour la vie de chacun. Il faut intégrer son histoire c'est-à-dire réunir les pièces des expériences positives et négatives afin de pouvoir lui donner un sens. Une vie qui n’est pas intégrée est une vie désintégrée, souvent, nous les religieux et chrétiens, vivons une vie qui n’est pas intégrée. Cela arrive puisque nous voulons effacer une pièce d’expérience négative dans notre vie passée, ou chercher à l’oublier. St Paul comme nous l’avons dit, nous invite à entrer dans le processus de récapitulation de toutes choses dans le Christ, celles du ciel et celles de la terre. Jésus a dit qu’il faut que le blé et l’ivraie grandissent ensemble jusqu’à la moisson pendant laquelle il y aura la séparation. Dans l’épisode de la multiplication des pains, Jésus a commandé à ses disciples de ramasser tous les morceaux de pain qui restaient. De la même façon, notre Dieu nous demande de ramasser les événements ou les expériences vécues bonnes et mauvaises de leur donner un sens. A ce niveau nous pouvons dire que la récapitulation ou l’intégration est un processus qui a diverses opérations : réunir, compléter, corriger et réorienter, reaccueillir et mettre ensemble, et enfin faire une synthèse de notre vie. Intégrer signifie avoir un centre, être attiré, donner le sens, réconcilier, récapituler, complèter, renouveler...........
La croix est la source de sens et le centre d’attraction. C’est l’unstrument d’intégration qui donne le sens à toute l’histoire, passé et présent: Jn 12:32 Et moi, quand j'aurai été élevé de la terre, j'attirerai tous les hommes à moi. Col,1. 17 Il est avant toutes choses, et toutes choses subsistent en lui.
La vie missionnaire de chacun peut être intégrée ou désintégrée, récapitulée ou non récapitulée. Question de réflexion : est ce que ma vie missionnaire est intégrée à un centre vital? ; est ce que je peux faire une synthèse de ma vie missionnaire ? La question qui suit est comment intégrer ma vie ? Ou faire une synthèse de ma vie missionnaire.
La croix est l’instrument de l’intégration, elle transforme nos défauts, nos pechés, nos inconsistances et immaturités en une source de salut, Au point de dire avec St. Paul que quand je suis faible c’est alors que je suis fort.
Le mystère pascal, est une formule de faire la synthèse de sa vie. Tout ce qui nous arrive du matin au soir doit être réuni, transformé et synthétisé chaque jour à travers la Croix.
En pensant au thème biennal d’interculturalité nous sommes invités à faire cet exercise d’apprendre à ressembler notre propre histoire pour y trouver l’action de Dieu qui est parfois implicite et parfois explicite. Cette action est présente dans chaque événement qui se passe dans la vie. Nous sommes invités à trouver le sens dans le défi de la vie communautaire. La magna carta nous dit que la croix est un mystère qui nous indique le chemin à suivre, la kenosi (le vidage) l’anéantissement de soi, parce que sans passion il n’y a pas de salut. Mon frère devient ma croix que je dois transporter, sur laquelle je doit mourir en me vidant de ma propre culture, je l’approche pour l’écouter, le comprendre, l’accepter, l’accuieillir en lui laissant l’espace dans mon cœur et donc en étant disponible à l’aimer.
Point Pratique: En étudiant ton histoire, en ramassant toutes ses pièces, en utilisant le mystère pascale essai de faire une récapitulation, une synthèse, une intégration de tous tes soucis dans la croix du Christ pour être transformé à l’occassion de cette Pâque.
Que cette Pâque ne soit pas un souvenir mais une réalité actuelle de chacun de nous.
Bonne Pâque à vous tous.
Par le P. Paul Gitonga Muriithi